Cette pièce raconte une France-Algérie de 1930 à 2019 : celle de Léone hier qui sera mariée de force car on n’épouse pas un “Bougnoule”, celle de Katia aujourd’hui qui écrit des poèmes dans des cahiers qui brûlent, celle de Jughurta demain dont les grands-parents sont morts pour sauver la France en 1944 mais qui ne peut pas passer la frontière…
Mêlant la petite et la grande histoire, les trajectoires intimes et les bouleversements du monde, ainsi qu’un soupçon de physique quantique, cette pièce est un questionnement sur nos identités, et sur cette histoire officielle que l’on détricote pour découvrir celle qui était en fait en-dessous.
Un projet soutenu par la Fondation Cimetta et la Ville de Strasbourg.
Quand le douanier te retient, toi, Hakim
dans un coin
alors que tous tes collègues viennent de passer sans souci à l’aéroport ;
quand le douanier te demande à toi, Hakim,
« Bon, en vrai, t’es d’où ? »
quand le douanier te demande
« allez, sors ton autre passeport »
quand ta tête de Hakim elle revient pas au douanier
que Hakim il est trop bronzé
que Hakim c’est islamisant, c’est pas dans le calendrier
que Hakim ça peut pas être un vrai Français ça…
J’aimerais que l’océan soit de pierre pour le gravir.
Il n’y a rien que je ne puisse porter, pousser.
C’est toujours moi qui engloutis.
Mais,
il y a des vagues contre lesquelles je ne sais me battre.
Elles se briseraient sur ma carcasse,
carcasse-fracasse
laissant mon corps inerte dans les eaux froides.
C’est la mort qui a caché son visage
derrière les vagues.
J’suis pas matelot.
Court temps.
Toi tu sais habiller les mots, p’tite sœur.
Tu t’en sortiras avec tout ce que tu sais écrire…
Mes frères ont cousu leurs rêves aux cimes,
tout là-haut.
Ils prennent de l’élan, sur les hauts plateaux,
pour lancer leur chance dans le ciel,
et voir si elle tombe,
pile ou face.Ce sont les hommes d’en haut,
ils dorment les pieds dans le ciel.J’ai les oreilles pleines
des soupirs de tous ceux qui restent.Combien pèse
une jeunesse entière
nourrie de rêves ?
« Chez nous,
c’est un pays où les montagnes se déplacent.
Chaque cousin exilé emporte avec luiun peu d’ici. »